La nouvelle puissance du dollar : quel impact réel sur l’économie sénégalaise ?
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- Comprendre en détails les enjeux de la montée du dollar
Les dernières actualités s’étendent autour de la question du dollar qui a pris le dessus. En effet, la guerre Ukraine-Russie a précipité la chute de l’Euro face au Dollar américain ; le continent africain n’en demeurera pas de marbre. Cette parité risque d’impacter négativement l’économie sénégalaise dont 40% de la dette extérieure est libellée en Dollar, la possibilité pour les vendeurs sénégalais et les acteurs du Tourisme de profiter du fort taux de change du Dollar, les avantages pour la zone CFA de s’arrimer au Dollar américain, au Yuan chinois ou au Livre anglais, les grandes opportunités qui s’ouvrent au Sénégal en cas de création d’une monnaie nationale, si et seulement si, un leader éclairé est à la tête du pays.
« La parité d’une monnaie ou taux de change représente la valeur de cette monnaie par rapport à une autre. La parité dollar/euro ou euro/dollar représente la valeur d’une des monnaies comparativement à l’autre. La force de la monnaie ne se mesure pas uniquement par rapport à son taux de change par rapport à d’autres monnaies qui, par définition, est évolutif et résultant également de paramètres économiques et financiers particuliers en fonction des politiques des pays notamment en rapport au taux d’intérêt, à l’inflation, au solde extérieur, aux flux d’investissements, au niveau de croissance…
En fonction des objectifs poursuivis par les Etats, les leviers ci-dessus peuvent être modifiés et ainsi impacter le taux de change dans un sens comme dans un autre. La force d’une monnaie réside aussi dans son attractivité et dans la confiance placée en elle par les investisseurs et, de ce point de vue, le dollar demeure une monnaie forte, solide dans le commerce international et est la principale monnaie de réserve dans le monde ». a expliqué le Economiste et analyste financier, Cheikh Fatma Diop
« Le Sénégal qui est un importateur net en produits agricoles et énergétiques et dont la monnaie – le franc CFA- arrimée à l’euro, subira les effets du dévissage de la devise européenne. Le dollar est la monnaie de facturation des principales importations du monde et son renchérissement n’est pas une bonne nouvelle pour les importations. Le baril de pétrole, le blé, les produits laitiers, le riz – autant de produits importés – coûteront plus chers par le jeu du taux de change dollar/CFA ; toutes autres choses étant égales par ailleurs. La compétitivité des entreprises sénégalaises qui importent des intrants ou produits intermédiaires facturés en dollar sera particulièrement challengée. Deuxièmement, 40% de la dette extérieure du Sénégal étant libellée en dollars, le service de cette dette coûtera plus cher à l’Etat du Sénégal face à un dollar aussi haut. Le solde du compte courant se détériorera davantage donc.
Ceci dit, un dollar plus fort favorise les exportations. Les vendeurs sénégalais au reste du monde profiteront de la situation actuelle même si l’on sait que beaucoup de produits exportés notamment dans l’agro-alimentaire sont faibles en valeur ajoutée car faiblement transformés.
Le tourisme, si le marketing est bien fait, est un secteur qui pourrait tirer profit d’un dollar plus fort. Son attractivité se renforce lorsqu’un dollar d’un touriste sénégalais génère plus de francs CFA en dépense locale ».
Le CFA gagnerait plus à être arrimé au Dollar américain, au Yuan chinois ou au Livre sterling britannique
« Il est clair qu’en l’état actuel, notre position monétaire est plus déterminée par les évènements socio-économiques et géopolitiques qui frappent la Zone Euro que par une politique autonome qu’on mène adossée à des objectifs de développement spécifique. L’arrimage à l’euro est une hérésie historique qui perdure. De notre avis, le franc CFA devrait plutôt être adossé à un panier de devises qui refléterait davantage l’évolution actuelle et les perspectives de plus long terme du commerce international. Dans un tel panier, le Yuan chinois, le dollar américain, la livre sterling anglaise occuperaient une place importante pour plusieurs raisons ».
« Il est possible d’adopter un système de change flottant par rapport aux autres monnaies mais avec les éléments de fluctuation de la valeur de la monnaie, tant au plan interne qu’externe, je l’aurais adopté dans le cadre d’une monnaie nationale avec une banque centrale autonome maîtresse de ses politiques et de ses objectifs. Ainsi, l’arrimage du CFA communautaire au panier de devises susmentionné serait une étape intermédiaire pour rééquilibrer les rapports commerciaux avec le reste du monde.
A terme, en effet, dans ma lecture, l’idéal serait l’adoption d’une monnaie nationale, souveraine lorsque le leadership politique sera au niveau des exigences d’une bonne conduite de la politique monétaire ».