Les nombreux prédateurs de l’économie mondial
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- La cherté de la vie risque de perdurer par les nombreux aléas mondiaux
La pandémie du Covid 19 et la crise ukrainienne ont impacté beaucoup dans beaucoup de pays. Les pays dans l’espace UEMOA, ont connu une progression de l’activité économique de l’ordre de 6% en 2021 contre 1,8% en 2020 ; le Sénégal, avec une croissance du Pib de 5% en 2021, traîne derrière la Côte d’Ivoire. Malheureusement, le retour de l’inflation, établi à 6% annuels, efface toute la richesse et tout le pouvoir d’achat générés par cette croissance économique.
Les fortes importations de céréales, de denrées de toutes sortes et de produits pétroliers ont négativement impacté les comptes extérieurs malgré l’exportation de matières premières, d’or brut, de café et de cacao.
En langage courant, notre déficit commercial (total des importations -total des exportations) est toujours supérieur à 2200 milliards de F Cfa. A titre illustratif -pour le cas du Sénégal-, nos exportations de poisson, d’or brut, de phosphate et d’arachide sont loin de compenser nos importations de riz et de pétrole. Les entrées au Port de Dakar de ces deux derniers produits -les céréales, le pétrole et produits raffinés-nous reviennent à 2000 milliards de F Cfa annuellement, selon les notes de conjoncture de la Bceao. Nos habitudes alimentaires et énergétiques sont trop lourdes, insoutenables et même ruineuses.
A ce fardeau, s’ajoute maintenant l’appréciation du dollar américain. Le dollar domine le commerce international, 70% des échanges mondiaux sont libellés en dollar. Pour le pétrole et le gaz, le billet vert reste hégémonique comme monnaie de facturation.
Aux facteurs conjoncturels et géopolitiques qui expliquent l’appréciation du billet vert, s’ajoutent des politiques monétaires souvent divergentes entre l’Europe et les Usa. En effet, le dollar est perçu comme une valeur refuge en temps de crise. L’attractivité du billet vert est renforcée par le différentiel de taux en défaveur de l’euro : la Banque centrale américaine (Fed), pour lutter contre l’inflation, a commencé en mai 2022, un cycle assez vigoureux de hausse des taux directeurs situés entre 2,25% et 2,50% en juillet 2022 ; alors que la Banque centrale européenne était encore au début de ce mouvement. Les taux d’intérêt -en zone euro- sur les opérations de refinancement, de facilité de prêt et de dépôt passent ou sont passés de 0,50%, 0,75% et 0,00% à compter du 27 juillet 2022. Pour les cambistes et investisseurs, le billet vert redevient très rémunérateur par rapport à l’euro, surtout dans un contexte de crise économique dans la zone euro avec le rationnement du gaz russe. L’Europe a peur de relever vigoureusement ses taux pour ne pas compromettre une relance trop fragile de l’économie.
Ainsi, le dollar américain a le vent en poupe : il s’est apprécié d’environ 11% depuis le début de l’année et a atteint, pour la première fois en vingt ans, la parité avec l’euro. Les investisseurs abandonnent leurs positions en Europe, dans les pays émergents et ailleurs, ils cherchent refuge dans les actifs libellés en dollar américain et, évidemment, ils ont besoin de dollars pour les acheter.
Pour le Sénégal, la facture pétrolière et céréalière sera revue fortement à la hausse et le paiement de la dette et des services qui s’y rattache, va augmenter considérablement.
« Les pays de l’UEMOA sont des «preneurs de prix» : nos Etats faibles ne sont pas en mesure de négocier avec nos partenaires, donc nos politiques n’ont aucun impact sur les marchés mondiaux. Ce qui fait que nous sommes largement tributaires du commerce mondial et un dollar fort peut avoir des répercussions majeures sur l’économie nationale, notamment un rebond de l’inflation. » a dit Moustapha DIAKHATÉ, Expert et Consultant en Infrastructure.
Pour l’endettement du continent, qui a atteint des sommets avec la mise à disposition des Dts par le Fmi, il faut s’attendre à une vague de crises sur les dettes souveraines, les pays africains devront supporter le fardeau des taux de change. Aucun investisseur ne voudra être payé en euro, qui est devenu une devise déclinante et peu rémunératrice. Les mouvements dans le marché des capitaux à l’échelle mondiale donnent le tournis. Avec les plateformes informatiques, des milliards de devises peuvent quitter à la seconde un pays pour un autre, sans aucune régulation internationale.
« L’appréciation du dollar doit figurer dans l’agenda de la présidence sénégalaise de l’Union africaine, pour conjurer un énième choc économique qui pourrait être fatal à l’économie africaine. » a expliqué Moustapha DIAKHATÉ, Expert et Consultant en Infrastructure.